Avant qu’advienne hier un attentat dont l’horreur graphique et symbolique se passe de commentaire (la décapitation près de son école d’un prof d’éducation civique), la presse bruissait encore d’un nouveau mot: « acceptabilité » qui aurait mérité quelque commentaire.

Il tournait sur les plateaux en boucle dans la bouche des commentateurs avant et après que Macron annonce, il y a trois jours, que la France serait « sous couvre-feu » après 21 heures à partir d’aujourdhui, 17 octobre. On réfléchissait et estimait doctement l’ »acceptabilité » des mesures  de

reconfinement. Ca sonnait drôlement dans la bouche des journalistes, et certains me semblaient mal à l’aise.

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Il y a quelque chose qui se passe et l’on fait comme si… rien ne se passait. Comme si l’on avait toujours parlé d’ « acceptabilité ». Tous les journalistes un peu rodés doivent tout de même avoir lu Orwell. Ils devraient quand même avoir une certaine possibilité de recul sur les mots qu’ils utilisent. 

Un journaliste est quelqu’un qui s’exprime de la manière la plus objective possible (« Rien que les faits », professait-on autrefois). Mais est-ce plus objectif de parler ici d’acceptabilité que de soumission???

Le journalisme se dissout dans la com

Notre monde de com et de management produit naturellement des termes aux apparences neutres, pour en remplacer d’autres plus gênants, parce que plus clairs, plus signifiants. Ce processus d’euphémisation communicationnelle est pernicieusement confondu avec la recherche de l’objectivité du journaliste.

Ceci va exponentiellement depuis 6 mois. Maintenant, les journalistes, pour avoir l’air neutre, pour « s’en tenir aux faits », bref, pour avoir l’air de journalistes, doivent parler la novlangue.

Pour le gouvernement, bien sûr, il vaut mieux mettre l’emphase sur l’ « acceptabilité des mesures » que sur la soumission du peuple. Dans cet article qui précède l’intervention de Macron, on voit que le terme est utilisé par un membre de l’exécutif qui juge que « l’acceptabilité de mesures fortes est moins grande qu’en mars ». On se croirait dans le bulletin météo. A l’évidence, le gouvernement produit un chapelet de mots clés de circonstance pour baliser les annonces du Président. Mais ce qui est étonnant c’est de voir comment toute la presse moutonnière reprend cette com packagée. En faisant une recherche on constate que la presse écrite a pareillement tartiné sur l’« acceptabilité des mesures » en amont et en aval de l’intervention (ici, ici ou ici).

Et ce qui est encore plus étonnant, c’est qu’un peuple accepte qu’on l’informe à propos de sa propre soumission, sans que persyonne relève le piquant de cette situation. Soumission à un état d’exception qui ne dit pas son nom et dont la disproportion criante est savamment dissimulée par la presse quzi choisit de faire la com du gouvernement. Ca me semble vicieux de façon transparente. Pourtant, cela ne soulève pas de protestation ni de questionnement. Dans cette ambiance, celui qui souligne cette solidarité de la presse avec les démarches du gouvernement sera facilement taxé d’hystérie, d’excès ou de détrangement. Bref de non-objectivité….

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Un processus qui ne nous concerne pas en tant que citoyens

Parler d’acceptabilité, c’est envisager une simple variable. C’est envisager un processus impersonnel, massifié. Quand on nous parle d’acceptabilité, on nous fait considérer un indicateur sur le panneau de pilotage de la France en crise, depuis leuel Macron affronterait vaillamment la tempête. On nous met dans la peau du technocrate (du marketteur, de l’ingénieur social), pour qui la question est strictement: comment faire aceepter par la population des mesures absolument nécessaires?

Ainsi est évacué tout débat sur la nécessité de ces mesures. Et l’on nous fait surtout oublier subtilement que c’est nous qui acceptons ces mesures.

Nous inculquer l’autocensure subtilement

En nous introduisant dans le cercle des experts sur la gestion des masses, on nous flatte et nous incite à appliquer  à notre échelle les forme de censure et d’autocensure qui doivent, dans ce protocole de crise, réduire toute information non validée. On nous incite à reproduire la dichotomie entre la bonne info (celle des experts) qu’il faut croire, et la mauvaise (celle qui questionne l’état d’exception) qu’il faut ignorer. Ainsi se renforce la structure bio-sanitaire de contrôle qui s’érige, entre l’OMS, les gouvernements, les GAFA, etc.

Apparemment ça marche. Oui, c’est du management. Inventer des mots pour dissimuler les aspects gênants de la réalité.Et c’est aussi ce qu’ont fait toutes les dictatures. Et dire que nous avons tous été éduqués avec la critique majeure du totalitarisme qu’est 1984 de IOrwell qui demeure je crois une lecture scolaire assez systématique. Mais qui se souvient que l’utopie d’Orwell avait bien lieu en Angleterre, en Occident?

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On voit de manière transparente que ces mots clés ruissellent naturellement dans la presse depuis le gouvernement. Mais est-ce qu’ils remontent de plus haut?

Quand je tape le mot acceptabilité sur le moteur de recherche, je tombe sur un article de Mediapart fouillé qui se montre bien plus critique vis-à-vis du concept qu’aujourd’hui. On y constate notamment que « La notion d’acceptabilité ne permet pas d’avoir une distance critique par rapport au dispositif lui-même. »

Gaëtan Thomas [5], historien de la médecine et de la vaccination nous explique que les « études d’acceptabiltié » se sont multipliées en France depuis les années 80, précisément parce que «  les responsables sanitaires jugeaient que l’obligation légale n’était plus l’outil le plus approprié pour étendre la vaccination ». 

L’historien de la médecine et de la vaccination nous informe qu’il est commun, en matière de politiques sanitaires et spécialement pour les vaccins, de raisonner en terme d’acceptabilité est d’études d’acceptabilité. Le Vaccine Confidence Project en Grande-Bretagne juge par exemple que la France est l’un des pays au taux le plus faible d’acceptabilité pour les vaccins! 

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Une définition « pas stabilisée »

Et Gaëtan Thomas souligne finalement qu’ « en dépit de cette inflation d’études d’acceptabilité et des recours divers à cette notion, la définition du terme n’est pas stabilisée. » Et ce qui est dit ici pourrait être dit de tant de choses de notre monde covid actuel, dont les définitions ne sont pas stabilisées…

Bien sûr ce terme ne se rapporte à rien de précis. Il ne sert pas à décrire la réalité mais à la construire. Parler d’ « acceptabilité des mesures» avec un air naturel, c’est simplement accroitre l’acceptabilité des mesures. 

Le journaliste dans cette crise, comme dans la guerre, est là pour servir le pouvoir dans une union sacrée. Le pouvoir quant à lui reçoit des conseil avisés de son Conseil scientifique, Task Force Covid ou autres, qui remontent à une nébuleuse assez vague que j’évoquais ici et ici. Partout, j’imagine qu’on « informe » les gens que le gouvernement réfléchit sur l’acceptabilité des mesures à prendre.

Ainsi advient la machine de propagande biosanitaire.