Voici une réunion de personnes qui se demandent pendant 35 minutes comment instaurer une censure généralisée sans jamais prononcer ce mot. Ils ont parfois l’air de le regretter un peu, au détour d’un sourire mal ajusté. Mais comme ils sont certains d’avoir raison, ils mettent tout leur coeur à concevoir une stratégie de centralisation radicale de l’information. Information qui ensuite sera déversées (cascaded, dit un panel liste)  à partir de l’OMS aux différents acteurs concernés (gouvernements, médias officiels, médecins, réseaux sociaux, société civile). C’est pour le bien de l’humanité.

Event 201: la simulation de ce que nous vivons aujourd’hui

Il s’agit de la simulation effectuée il y a un an par la fondation Bill Gates, le World Economic Forum, et la John Hopkins University pour une pandémie éventuelle d’un virus mortel qui a eu lieu il y a un an. Il est à noter que ce genre de simulation de réponse à une pandémie catastrophique existe depuis au moins vingt ans. (Pensons par analogie à cette régularité souvent constatée par les historiens qu’un pays qui investit longtempss et beaucoup dans son appareil militaire va presque fatalement entrer en guerre).

Je tiens à préciser que les participants sont littéralement  les personnes qui suscitent les réponses de chaque pays, notamment par l’intermédiaires des comités « scientifiques » nationaux (Task force suisse, Conseil Scientifique en France, CDC US) , mais aussi par bien d’autre biais que nous allons examiner dans ce post. 

Ce sont tous des membres de toutes les institutions névralgiques dans la crise: L’Organisation Mondiale de la Santé, Fondation Bill Gates, GAVI (Alliance pour les vaccins financée par Bill Gates), Forum de Davos (WEF), grands médias (NBC Universal), CDC (Centre des maladies et Contamination qui gère le Covid aux US), le chef du CDC chinois, et en prime quelques banques, entreprises, sans oublier la CIA (Avril Haynes, ex-vice directrice fait ici une magistrale démonstration de langue de bois orwellienne).

Pas des idées, des mots-clé (à l’extrème du management)

La discussion ressemble à un échange d’arguments mais en écoutant bien, ce n’est qu’une suite de mots clés que chaque panellistes habille d’un semblant de discours parlé et d’articulation logique. Il y a de quoi douter de la sincérité de ces leaders. Certains, habitués à de tels exercices communicationnels, auraient presque l’air naturel, si ce n’était l’indigence et la redondance des propos (ceux là sont bien sûr les plus inquiétants). 

Ecouter très attentivement ce débat est fascinant: nous avons effectivement la pensée manageuriale qui y atteint un point de non retour absolument orwellien (C’est bien le newspeak dont le grand autour nous parlait dans 1984). Peut-être est-ce la marque du fait que cela se situe proprement au sommet de la globalisation technocratique.

Le diable est dans les détails

Il faut écouter le détail de ces discours. Chaque phrase prononcée mérite une analyse logique et sémantique précise pour mettre à jour à quel point ce discours est vicié par l’absurdité. En prenant garde a la physionomie des participants, je crois que nous n’avons pas besoin de sémiologue ou psychologue pour voir que ces gens sont mal à l’aise et présentent des signes de dissociation avec eux-mêmes. Une partie d’eux-même désapprouve ce que l’autre partie effectue.

C’est donc un peu morbide, mais je crois qu’ici les détails de l’incompétence, contrairement au principe de Miranda Priestley, doivent nous intéresser, puisqu’il s’agit des gestionnaire de la crise qui menace ne jamais devoir s’arrêter. De même que les détails de la médiocrité, de l’hypocrisie et disons-le, l’évidente malhonnêteté de cette discussion qui me fait penser au grand film de Kubrick, Docteur Srtangelove.

Traduire cette langue et la montrer dans le détail m’a paru important pour mettre à jour tous es vices qu’elle charrie. Elle n’est sans doute pas faite pour être vraiment écoutée mais seulement pour être vaguement comprise. L’examiner et la fixer dans son essence, pour la dénoncer en soi, voilà qui est aujourd’hui une entreprise de salut public.

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Warroom dans Docteur Folamour, Doctor Strangelove (1964), de Stanley Kubrick. Intéressant de considérer que les managers actuels se plaisent à appeler leur lieu de réunion des « warroom ».

Le modèle d’une catastrophe totale

La simulation présente un monde face à une catastrophe sanitaire majeure, qui entraine une spirale d’autres catastrophes (politiques, sociales, économiques). La déstabilisation sanitaire entraîne l’effondrement de l’économie, la déstabilisation politique, une défiance généralisée qu’affrontent toutes les institutions. En situation de crise, on fait de la communication de crise, c’est à dire qu’on se barricade autour du point de vue de l’organisation en question. (Ceci est à peu près le contraire de ce qu’on attend d’un scientifique, mais aucun des scientifiques présents n’a l’air de s’en soucier). 

La fausse information et les groupes mal-intentionnés

Le problème majeur qu’affronte notre comité est la diffusion exponentielle des « fausses informations ». Celles-ci proviennent de comptes possédés par des groupes soutenus par des Etats (malintentionnés) qui les promeuvent pour « semer la discorde et le chaos ».

On pense alors aux traditionnels coupables, Etats voyous comme la Russie, l’Iran (ces Etats où l’on n’a pas la chance, nous dit la représentante de NBC Universal de prendre pour acquis la liberté de la presse). Sans doute la Chine n’est pas consiemment visée ici, puisqu’elle est à la table en la personne du gestionnaire en chef pour le COVId en Chine. Mais on peut facilement penser à la Suède qui suit peu les consignes fluctuante de l’OMS, et représente donc un cas flagrant de comportement guidé par une « mauvaise information ». Et la communication du gouvernement suédois, selon les critères qui sont énoncés, peut de facto être considérée comme de la désinformation.

Contrôle radical de l’information

Ici le Dr. Tom Inglesby, grand épidémiologiste de l’Université John Hopkins et membre du CDC (centre de gestion US dews maladies et contamination) présente la question qui doit être examinée dans ce segment de façon presque transparente:

How can governments, international businesses, international organisations ensure that reliable information is getting to the public?, and prevent highly damaging and false information to the extent that’s possible about the pandemic from spreading and causing deepening crisis around the world?

[COmment les gouvernements, le business international, les organisations internationales peuvent assurer qu’une information fiable (reliable) parvient au public? Et comment, si c’est possible, empêcher qu’une information fausse et hautement préjudiciable sur la pandémie se répande et cause une aggravation de la crise dans le monde?]

En fait la question de « si c’est possible » ne sera pas évoquée, mais je suppose que ça fait partie des petites maladresses verbales qui dénotent le malaise de celui qui évite de dire des choses telles qu’elles lui apparaissent vraiment pour les faire apparaître telles qu’il veut les faire apparaître (cet évitement pourrait être une définition de la pratique la langue euphémistique manageuriale). La solution proposée par Inglesby comme d’autres est la « submersion de bonne information » [good information flooding] (le mot clé revient sans cesse, notamment dans cette tirade mémorablement orwellienne d’un autre paneliste)!

La « bonne information » contre la « mauvaise information »

Mais à l’évidence, l’information fiable, la bonne information, c’est celle que le comité décide de diffuser et la mauvaise, celle qu’il n’avalise pas parce qu’elle le contredit. Est-il normal qu’un « scientifique » (épidémiologiste, médecin) se prête à de telles présuppositions? Qu’il prête son autorité pour un processus de contrôle centralisé de l’information -justifié par l’état d’urgence sanitaire- dont une règle évidente est qu’il a raison par définition?

De quelle science parlons-nous?

Pour finir, voici le directeur du Centre Chinois de gestion des maladies et contaminations qui met son autorité (scientifique?) dans la balance:

Tout ceci est basé sur de l’information basée scientifiquement [Science based information]!

Mais quelle est la science en question? La science de la communication de crise? Quelle autre science pourrait-ce être?

Management vs science

Si c’est la science au sens traditionnel, qui est évoquée dans cette déclaration, c’est seulement parce que le comité considère a priori qu’il possède la bonne science, la bonne information. Et cette présupposition est précisément le principe de la communication de guerre.

La question qui vient logiquement est: est-ce que la communication d’urgence (c’est à dire la com, le management, c’est à dire l’organisation que la pensée manageuriale promeut par essence) pourrait avoir complètement phagocyté ce que les épistémologues s’accorde plus où moins encore à appeler « science », et ce au point de lui faire dire n’importe quoi?

Par exemple dire que l’épidémie est beaucoup plus grave qu’elle ne l’est en réalité? Ceci pourrait être déterminé par toute cette machine protocolaire qui prendrait -par erreur incompétence ou malhonnêteté- le modèle envisagé (proposé dans la simulation) pour la réalité.

La question de l’influence de l’économie et du management sur la science était déjà posée bien avant cette crise. Elle s’avère aujourd’hui brûlante. La pensée manageuriale et la com, du moins celles appliquées paroxystiquement comme ici, sont exactement l’inverse de recherche de la vérité, de la science.

Bref, peut-être que SkyNet, comme dans Terminator a pris possession de l’humanité. C’est l’hypothèse que faisait le philosophe Giorgio Agamben au début de la crise. Il s’est fait traiter d’allumé, voire de complotiste, mais l’examen précis du discours de nos gestionnaires crise porte à considérer très poréécisément cette hypothèse apocalyptique.

(la suite)