Ce dispositif permet de faire dire n’importe quoi à n’importe qui sur une vidéo. Et n’importe quel imitateur un peu chevronné pourra en assurer la contrepartie audio.

Voilà le genre de technologies à la Black miroir qui vont enfin nous permettre de tirer un trait définitif sur ce vieux principe de réalité. Et ne sont-elles pas déjà en place? Se poser ce genre de question a un caractère dissolvant en soi… Effet de dissuasion antiréaliste: dans un tel environnement technique, qui peut encore croire en la réalité?

On a sans doute affaire ici à ce que Baudrillard nomme un simulacre. Contrairement à la dissimulation où l’on feint l’absence d’un élément présent, dans la simulation (=simulacre), on feint la présence d’un élément absent. On feint d’avoir ce que l’on n’a pas, d’être ce que l’on n’est pas. Au point de vue systémique, le simulacre c’est le modèle qui précède la réalité, la remplace, la devient. Voilà posées en gras, les définitions que Baudrillard donne de ce concept, rentré aujourd’hui dans le catalogue des idées reçues de notre temps.

Les simulacres prolifèrent dans la phase tardive du capitalisme. Y règnent alors ces signes/produits destinés à réenchanter un monde désenchanté par l’intégration marchande illimitée (par les précédents simulacres sécrétés par le système). Ainsi disparaît gentiment la réalité, dans une sorte de spirale déflationiste (une boucle de renforcement négatif, en termes cybernétiques/systémiques). Ainsi advient la néoréalité, par remplacement progressif.